Page 114 - Nouvelles égyptiennes - Nouvelles antiques
P. 114
c’est un parpaing, tombé d’une tour en construction,
qui vint s’écraser à mes pieds. Or ce jour était un
dimanche et le chantier était désert… Puis des maux
étranges m’assaillirent : une f ièvre sans cause appa-
rente me f it délirer plusieurs jours ; je sombrai dans
un long coma à la suite d’une grippe anodine… La
nuit, chez moi, quand la ville s’endormait enf in et
la crainte délaissait mon âme, je prenais la statuette
en main, la contemplais, la caressais, et ma vie sur
Ouadjet, les bords du Nil revenait d’un coup en mémoire… Je
déesse cobra crus pouvoir tromper le sort. Je f inis par quitter la
ville, source de tous les dangers. Je m’installai dans
la montagne, à quelques pas de ton village. Pendant
longtemps, je fus tranquille. Je crus qu’on m’avait
oublié. Mais les dieux se souviennent toujours.
L’aspic qui m’a mordu, hier, lorsque je marchais
dans les herbes, c’était Ouadjet, la déesse serpent,
venue accomplir sa vengeance !
– Mais pourquoi avoir pris la statuette si vous
saviez ce qui allait suivre ?
Je lâchai ces mots d’un seul coup, tant la question
me taraudait.
Ses yeux se rivèrent sur les miens ; j’y vis la bril-
lance du soleil.
– C’est qu’elle était ma part d’Égypte… et l’Égypte
est plus belle que tout.
Le haut-parleur : je me réveille ; les autres sont
déjà sortis.
112