Page 81 - Nouvelles égyptiennes - Nouvelles antiques
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Je sus bien vite qui tu étais.
Je posais des questions, écoutais, dans les mai-
sons, les salles, les temples. Les moins que rien de
mon espèce ne suscitent jamais de méf iance. Ils
sont des chiens qu’on laisse aller dans l’antre secret
des demeures, car jugés trop bêtes pour comprendre.
Comme le reste de tes semblables, tu avais rempli
tous les postes : directeur de troupeaux, comptable,
préposé aux soldats, scribe des recrues, du trésor,
de la bibliothèque royale, des temples, collecteur
d’impôts, chef des greniers, des grands travaux, de
l’entretien des routes et canaux, intendant des expé-
ditions, juge, et tu jouissais maintenant sans honte
des richesses que tu avais volées.
Je sus très vite où tu vivais, et sus comment te
retrouver.
Je me liai à l’un de tes hommes qui f init par me
faire admettre devant l’intendant du palais, celui en
charge des embauches : ce dernier cherchait un paria
pour purger tes latrines infâmes. J’acceptai, le cœur
palpitant. L’aubaine était pour moi immense.
Debout, la première nuit, j’épiai, depuis la fenêtre
de l’étable où les autres serviteurs dormaient. Je
vis une ombre sortir du porche : tu partais vider tes
entrailles. Le sang courut dans mes artères.
Je te précédai aussitôt…
– Qu’est-ce que tu fais là ? Va-t’en !
– C’est Den qui m’a engagé. Je nettoie.
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