Page 15 - Nouvelles égyptiennes - Nouvelles antiques
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d’aborder l’autre rive… » Aussitôt on crie de par-
tout, on réclame plus du vin, on saisit les viandes
à pleines mains. Mais personne, sauf moi, ne
remarque : son visage est devenu blême et sur sa
tête, le cône de parfum a tremblé…
Ahmès plissa les yeux.
– Plus tard, ce fut l’un des chanteurs qui livra
sa louange… Saisissant une pomme sur une pyra-
mide de fruits, il lance à tue-tête : « Ô Minnakht, cône de parfum
toi qui n’es que bonté, courage et équité, ne
doute pas de rejoindre le pays d’éternité, car ta
vie ici-bas fut toujours exemplaire ! » Les convives
applaudissent. Je le regarde et là…
Taouseret devint muette.
Minnakht était debout, sous le porche à
colonnes, la main droite serrant l’amulette.
Les roseaux bruissaient maintenant sous le
vent. Sur les berges tranquilles, les palmiers fré-
missaient en chœur. Tout autour s’étendaient
les flaques, bordées de papyrus où pépiaient les
oiseaux. Parfois, une mince silhouette féline glis-
sait entre les tiges, et des plumes s’élevaient…
Le médecin et le noble marchaient côte à côte ;
ce dernier serrait toujours l’amulette.
– Qu’est-il arrivé à la chasse ?
Minnakht regardait dans le vague, étranger à
ce monde de paix.
– Les autres étaient partis avec leurs grands papyrus
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