Page 74 - Nouvelles égyptiennes - Nouvelles antiques
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Malgré mes maintes prières à Mout, diminué par
mon lourd handicap, mon travail devenait trop lent.
Et bientôt les durs contremaîtres me jugèrent inapte
à la tâche.
Alors je me retrouvai tout seul…
– Quelque chose ne va pas ? f it le gros cuisinier.
Ce dernier, vêtu d’une blouse blanche, venait
d’entrer dans la tente.
– Lait, grenades, laitues, tu n’as pas lésiné sur
le menu des troupes.
Assis en tailleur, papyrus sur les genoux, le
scribe avait parlé sans lever les yeux de sa feuille.
– Mais, Tjay… Ce sont les ordres des off iciers…
– Sais-tu combien coûte ta cuisine ? Donne-
leur plutôt ail et oignons pour qu’ils aient de la
force au combat.
– Mais…
– Serais-tu avec l’ennemi ?
Mout, déesse Seul, sans ressources, dans le désert brûlant, patrie
maternelle des chacals, des serpents, des léopards, des hyènes,
je trouvai une aide imprévue auprès d’une tribu de
Bédouins qui faisaient paître leurs moutons et ven-
daient les richesses des sables.
Avec eux, des années durant, je f is voyager les trou-
peaux entre les oasis éparses et troquais les poudres
de fards contre les grains pour subsister. Je mangeais
le pain en galettes – elles cuisaient dans les dunes
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