Page 90 - Nouvelles égyptiennes - Nouvelles antiques
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– Mais lui, papa, vois-tu… lui c’est tout le
                              contraire.
                                Et son silence se mua en sourire éthéré.
                                L’homme la f ixait toujours. Son regard s’em-
                              bua. D’un geste de pudeur, il détourna la tête,
                              offrant son dos voûté pendant un long moment
                              – toute à sa rêverie, sa f ille était ailleurs – puis, les
                              jambes décharnées s’ébranlant avec peine, il se
                              mit à errer, lentement, dans la pièce.
                                – Ta mère était entrée dans la petite cabane et
                              j’attendais dehors, tout seul, ton arrivée…
                                Neith regarda son père ; il parlait dans le vague.
                                – La sage-femme lui avait mis son amulette au
            Taouret, déesse   cou : Taouret serait là pour vaincre les dangers.
           hippopotame de     Quand j’entrai dans la pièce, après ma longue
             la maternité
                              attente, je sus que la déesse avait tenu parole : ta
                              mère couchait, sereine, le front perlé de sueur et
                              toi, petite colombe, dormant entre ses bras ; tu
                              étais magnif ique et je versai des larmes…
                                La jeune femme frissonna.
                                – Grâce au lait de maman, tu grandis pour le
                              mieux. Je te revois encore, la ceinture à la taille,
                              la natte couvrant l’oreille, le haut du crâne rasé,
                              courant nue dans les herbes derrière des canetons ;
                              tu étais si espiègle… Tu folâtrais sans cesse… Mais
                              tu pouvais aussi être calme des heures durant…
                              Ta mère l’avait bien vu.  Elle tissait devant toi,
                              elle f ilait, elle cousait. Et tu restais assise, l’ob-
                              servant, attentive. Tu apprenais déjà sans même





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